Nous avons appris avec la plus grande tristesse le décès de Jean-Baptiste Etcharren survenu à son domicile de Saint-Jean-Pied-de-Port. Vous trouverez ci-après le témoignage de Pascal Goñi qui l’avait rencontré lorsqu’il écrivait un article sur l’histoire de notre association (la 2ème partie de cet article figurera dans le prochain numéro de la revue « Terres de Navarre »).
….Jean-Baptiste Etcharren a souhaité une simple cérémonie sans hommages pour ses funérailles qui ont eu lieu le 31 janvier dernier à Burguete. Cela ne surprendra pas ceux qui le connaissaient bien. Il était en effet d’une très grande modestie et ne livrait sa culture que si on le priait d’éclaircir certains points historiques. Il se plaisait à dire que sa contribution aux Amis de la Vieille Navarre avait toujours été secondaire. Cela n’est pas vrai si nous consultons les archives de l’association.
….Il aimait aussi raconter qu’au départ, il connaissait peu l’Espagne et la Navarre. Il avait 8 ans quand la Guerre civile éclata, ensuite ce fut la Seconde Guerre mondiale, la fermeture de la frontière par le gouvernement Bidault en 1946-47. Il ne savait donc pas grand-chose de ce pays situé pourtant à deux pas de chez lui. Il eut deux grands amours dans sa vie, son épouse et cette terre qu’il découvrit sur le tard grâce à cette dernière. Il acquit alors, comme souvent les néophytes, une culture encyclopédique dont allait profiter notre association lancée par Jean-Pierre Sallaberry en 1962. Celle-ci, qui prônait la rapprochement avec nos cousins navarrais, avait tout pour plaire à cet homme né à Uhart-Cize, aussi attaché désormais au pays de Cize qu’à la vallée de l’Erro. Lors des Jeux floraux de Sangüesa en septembre 1968, les Amis de la Vieille Navarre dotèrent le concours d’un prix récompensant l’auteur d’une biographie sur un Bas-Navarrais. Jean-Baptiste Etcharren remporta le prix sur une étude à partir de son mémoire de maîtrise sur l’humaniste du XVIème siècle, né comme lui à Uhart-Cize, Juan Huarte.
….Sa seconde contribution importante à l’association date de 1987, l’année où Lucien Hurmic prit la présidence après 7 années de vacance. Les liens culturels, folkloriques, voire sportifs avec Estella, ville jumelée avec Saint-Jean-Pied-de-Port en 1964, s’étaient naturellement distendus avec le temps. Le personnel politique n’était plus le même sur place et les élections avaient entraîné l’arrivée de nouveaux fonctionnaires pas toujours très accessibles. Jean-Baptiste Etcharren fut sollicité pour renouer des liens avec Pampelune qu’il avait tissés en tant que professeur d’espagnol et de directeur de Mayorga. L’année suivante correspondit avec le 4ème centenaire de la mort de Juan Huarte (1529-1588). Des députés, des sénateurs, des conseillers municipaux, des médecins, des professeurs venus de Pampelune visitèrent l’église d’Uhart, lieu de baptême du futur docteur. Jean-Baptiste fit visiter le quartier Judiri, car Huarte est probablement d’ascendance juive.
….Jean-Baptiste fut aussi vice-président de l’association (en même temps que le regretté Jacques Delpech et Bertrand St-Macary) au cours des années 2000 particulièrement fécondes pour les Amis de la Vieille Navarre sans que l’on puisse dire précisément les dossiers qu’il mena alors. Il défendit un nouveau bulletin plus moderne et suggéra le titre «Terres de Navarre» qui ne trahissait pas du tout les objectifs initiaux du Président Sallaberry surtout depuis la mise en place de Séminaires des deux Navarre en 2005 par le regretté Pierre Bidart et Lucien Hurmic. Ces deux derniers créèrent aussi un Collegium pour les sciences qui prit le nom de l’emblématique Juan Huarte. Retiré du bureau de l’association en 2014, Jean-Baptiste poursuivit son travail d’écriture en évoquant sa jeunesse et les passeurs pendant la Seconde Guerre mondiale. Il fit chez nous une dernière intervention avec sa fille sur ce dernier sujet en mars 2018. Il ne put assister à l’assemblée générale du 30 juin 2019 qui vit notre association adopter officiellement le nom qu’il avait proposé «Terres de Navarre».
….Lors de notre dernier entretien, Jean-Baptiste confessait qu’il était très douloureux de perdre sa fille, mais qu’il lui restait l’espoir de la revoir un jour. C’est chose faite aujourd’hui. Il pourra aussi s’entretenir avec ce Juan Huarte qu’il aura accompagné durant toute sa vie et se lancer avec lui en espagnol dans d’interminables spéculations scientifiques et philosophiques.
Nous adressons nos pensées très émues et nos condoléances à la famille et aux proches de Jean-Baptiste Etcharren.