Survol d’archive :
La Commanderie d’ARSORITZ
(Saint-Jean-le-Vieux – Basse-Navarre)
par Marie-Armelle et Louis Gentien
…..Cette archive provient d’une collection privée (famille d’Irumberry de Salaberry) comprenant de nombreux manuscrits de la fin du XVIe siècle au début du XXe siècle.
Rédigée en 1624, elle correspond à l’inventaire des biens de la commanderie, dépendante du monastère de Roncevaux, à la fin du XVIe siècle.
Elle se présente sous la forme d’un document en papier de quatre pages, rédigé en français et certifié comme étant la copie-traduction d’un document précédent rédigé en espagnol.
Quelques rappels historiques
Sources : abbé Haristoy (curé d’Irissarry) Recherches historiques sur le pays basque tome 1, Clément Urrutibéhéty Diez siglos de historia en ultrapuertos, Jean Baptiste Orpustan Les noms des maisons médiévales en Labourd Basse-Navarre et Soule, Musée de Basse-Navarre (www.mubana.fr)
Le terme de commanderie correspond à un établissement foncier appartenant à un ordre religieux et militaire ; elles sont apparues au XIIe siècle.
Comme de nombreux autres biens en Basse-Navarre (commanderies de : Bussunarits – Errekaldia, Bidarray, Saint-Michel, Mocosail) Arsoritz dépendait au XIIIe siècle du monastère de Roncevaux.
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La commanderie était installée sur le territoire actuel de la commune de Saint-Jean-le-Vieux (64220), ses domaines se situaient également sur les communes avoisinantes ; aujourd’hui, une maison est construite sur des soubassements des bâtiments d’origine.
Photo 2 Extrait carte Cassini (Geoportail)
L’abbé Haristoy considère qu’elle était constituée à l’origine en abbaye laïque et appartenait dès 1147 à « Marie de Labet fille de Martin seigneur de Labet, de Sare et seigneur de Perralta (Haute Navarre) ».
Son étendue et sa richesse ont été très variables au cours des siècles passant d‘un riche domaine pourvu de terres, vignes, maisons fivatières à une simple chapelle, dédiée à Santa Fe.
Photo 3 Stèle discoïdale retrouvée près d’Arsoritz (Musée de Basse-Navarre à Saint-Palais)
Éléments et remarques concernant le document et l’inventaire
…..La première page (Photo 1) du document reprend les références des titres de propriété :
« Livre général des biens et rentes ecclésiastiques… appartenant au monastère hopital royal de Sainte Marie de Ronceveaux Don Martin de Cordoua en vertu des brefs de sa Sainteté notre saint père pape Sixte Vème accordés à sa majesté le roy Don Philippe notre seigneur… ».
…..La fin de la première page (Photo 1) et la seconde page (Photo 4) correspondent à l’inventaire proprement dit :
« Inventaire des biens et appartenances de la maison d’Arsoritz la quelle est de la maison hopital de Ronceveaux.. » :
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un moulin, un bois, cinq maisons fivatières dont la redevance annuelle est de cinq «targes » (unité monétaire valant selon les époques un sol ou un demi-sol), une maison fivatière (paroisse de Zabalce) (les maisons fivatières étaient régies par des contrats d’affièvement correspondant à des baux perpétuels, laissant au bénéficiaire la liberté d’exploitation y compris la possibilité de construire une maison moyennant une redevance annuelle en argent et en nature – par exemple des journées de travail – et l’obligation de faire moudre ses grains au moulin du seigneur. Dans le cas de la commanderie d’Arsoritz, C. Urrutibéhéty considère que les bénéficiaires devaient également « défendre avec leurs armes la commanderie ». (Ce type de contrat a été aboli à la révolution française) ;
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«le moulin joignant à la dite maison, item son bois alentour de la maison, item cinq maisons fivatières qui payent à chaque année à trois targes…et est tenu d’aller moudre ses grains au moulin d’Arsoritz » ;
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des thuyas «item soixante d’aillerées [?] de fougères autrement du tuya alentour » ;
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500 pieds de pommiers «item elle a cinq cent pieds de pomiers la moitié vieux, l’autre moitié jeunes à la porte de la maison » ;
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15 journées de terres (surface estimée à un peu plus de sept ha) «item quinze journées de terres cultes ou environ à la porte de la dite maison » ;
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une borde éloignée d’un quart de lieue avec 40 journées de terres cultes;
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le tiers de la dîme d’Usakoa (Saint-Pé d’Usakoa à Saint-Jean-le-Vieux), la moitié de « l’oblation de quatre fêtes de l’année de la même paroisse « item elle a le tiers de la dime d’Oussacoua [Saint-Jean-le-Vieux] et la jouissance de la moitié de l’oblation de quatre fetes de l’année de la meme paroisse » ;
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«item elle a la jouissance de toutes les terres communes de Cize ».
…..La troisième page (Photo 5) correspond à la certification de conformité de l’inventaire par Don Sancho de Gavate [Garate ?], secrétaire et notaire apostolique ; cette conformité est réaffirmée par le témoignage, fait à Burguete, de deux autres notaires (Francisco et Pedro de Vargara). Le document se termine par une nouvelle certification conforme, faite à Saint-Jean-Pied-de-Port, par un quatrième notaire royal (bas-navarrais) : M. d’Hechegaray… !
…..Si ce document d’archive décrit l’inventaire de la commanderie, il montre également les parcours des actes notariés correspondants (entre la rédaction du XVIe et sa traduction au XVIIe siècle) :
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1695 (24 février à Burguete, Haute-Navarre) traduction en français d’un inventaire de 1585 des biens de la commanderie d’Asoriz par don Sancho Gavate, notaire apostolique actant au nom du monastère et hôpital royal de Roncevaux.
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1695 (10 mai à Saint-Jean-Pied-de-Port) certification conforme par maître Detchegaray, notaire royal.
La consultation d’archives de ce même fond montre que, jusqu’au milieu du XVIIe siècle, les actes notariés de Saint-Jean-Pied-de-Port étaient, le plus souvent, rédigés en espagnol et que ce n’est qu’à partir de 1660 qu’ils sont rédigés en français, d’où la nécessité de traduction (« translat » dans le texte) en 1695).
Nous espérons que la lecture rapide de ces quatre pages vous aura permis d’apprécier à la fois le maintien de liens patrimoniaux entre le sud et le nord de la Navarre – même un siècle après sa partition – et de mieux connaître le fonctionnement séculier d’une commanderie.
N’hésitez pas à nous faire part de vos commentaires.